Vacances à domicile : quand rester chez soi devient tendance

Les vacances, synonymes de voyage et de dépaysement ? Pas toujours ! De plus en plus de voyageurs choisissent de poser leurs valises... chez eux. Mais pourquoi renoncer aux plages de sable fin et aux cocktails ?

Rester chez soi pour les vacances, ce n’est pas vraiment nouveau. Mais la pandémie de COVID a véritablement mis cette pratique sous les feux de la rampe. Déjà, des événements comme les attentats du 11 septembre 2001 ou la crise de 2008 avaient amorcé cette tendance, incitant les voyageurs à privilégier des séjours plus proches de chez eux.

Aux États-Unis, on appelle cela le "staycation" (stay = rester, (va)cation = vacances). Ici, le terme désigne un choix délibéré de rester chez soi, non pas par contrainte financière, mais par envie de ne pas partir.*

"C'est arrivé pratiquement au même moment que la notion du cocooning avec le cinéma maison ou la popularité du jardinage, ce qui a renforcé la tendance" explique Paul Arseneault, titulaire d'une chaire de Tourisme à l'Université du Québec, dans une interview accordée au quotidien québécois Le Soleil.

Le staycation a alors rapidement franchi les frontières, séduisant des voyageurs du monde entier en quête de nouvelles expériences. Mais pourquoi cette popularité grandissante ? Si les contraintes économiques jouent un rôle, ce n’est pas la seule raison. Choisir de rester chez soi pendant ses congés, c’est aussi éviter le stress lié à l’organisation des voyages.

Et il faut dire que les Français sont inquiets. 95 % d’entre eux se déclarent stressés ou anxieux, selon une étude réalisée par l’Ifop pour le site Mes Bienfaits. Alors, préparer ses vacances, en plus de gérer le quotidien peut être un fardeau supplémentaire, surtout lorsque le quotidien représente à lui seul 56 % du stress chez les interrogés.

Opter pour des vacances à domicile permet alors de faire une pause mentale, sans les tracas des déplacements. C’est ce qu’a choisi Sonia, responsable éditoriale d'une trentaine d'années, enceinte de sept mois : “Cette année j'ai expérimenté la semaine off juste pour rester chez moi et prendre le temps. De me reposer, de faire quelques petites choses que je n'ai pas le temps de faire quand je travaille. Bien sûr, je suis enceinte et ça joue beaucoup. Honnêtement, je ne me serais pas vue barouder, je suis bien trop fatiguée à ce stade de la grossesse.”

Mais pour beaucoup de Français, les vacances restent synonymes d'évasion. “C'est vrai que pour moi, "vacances" c'est vraiment synonyme d'évasion, de voyage (souvent loin), pour faire une vraie coupure avec le quotidien. Même si en France on est pas mal lotis côté nombre de jours de congés, ça passe vite, et c'est comme si ce temps précieux devait être vraiment mis à profit pour partir.” confie Sonia.

Ce n’est pas l’avis de Louis, développeur de 30 ans. “Partir ou pas, peu importe. Par contre, pendant les vacances, même si je reste chez moi, j’aime faire des activités que je ne fais pas au quotidien”. Il profite alors avec sa femme pour visiter les coins près de chez lui, faire du kayak, se baigner dans des lacs.

Même en dehors des périodes de crise, environ 40 à 45 % des Français ne partent pas en vacances chaque année, principalement pour des raisons financières, selon l'Observatoire de la société. Mais cette pression sociale autour des vacances existe-t-elle vraiment ? Est-ce que nous jugeons réellement celles et ceux qui font des choix différents des nôtres quand il s'agit des sacro-saints congés ?

Sébastien Hof, psychologue confie au micro de RMC “À partir du moment où on ne part plus, c’est comme si on n’avait pas l'argent nécessaire, donc c’est se mettre dans une posture indélicate vis à vis des autres.” Un sentiment qui peut-être renforcé dans certaines situations professionnelles.

C’est ce qu’a ressenti Romane lors des ponts de mai. Elle n'avait rien prévu alors que presque tous ses collègues partaient en escapade. "Sur le moment, je me suis sentie mal à l'aise, un peu comme celle qui n’avait rien d’intéressant à faire," confie-t-elle. Ce sentiment s’est d’ailleurs amplifié avec les réseaux sociaux.

Aujourd'hui, plus que jamais, les vacances sont devenues un véritable spectacle sur les réseaux sociaux. C'est à qui partira dans la destination la plus insolite, avec la moindre foule. "Avant les vacances étaient une parenthèse pour souffler. Aujourd'hui, avec les réseaux, on a le sentiment qu'il faut en faire toujours plus, visiter tous les spots cool, ne rien louper" explique le sociologue Jean-Pierre Durand.

C’est peut-être pourquoi le budget des vacances d’été des Français est en hausse de 12 % par rapport à 2023, selon le baromètre mené par OpinionWay pour Sofinco ? Rien n’est moins sûr. Mais pour ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas, rester à la maison est aussi une manière de se réapproprier leur habitat.

Dans un quotidien qui file à toute vitesse, c’est une manière de redécouvrir son intérieur, de le réaménager, ou simplement de réexplorer son quartier, sa région, et tout ce qu'ils ont à offrir. Après tout, si nous avons choisi d’y vivre, c’est bien pour une raison.

C'est pour ça que certains profitent des vacances pour transformer leur intérieur ! Selon un sondage de Castorama réalisé en 2021, 47 % des Français ont choisi de se lancer dans des travaux chez eux pendant leurs congés. Et on comprend pourquoi : les réseaux sociaux débordent de projets DIY inspirants sur Instagram et Pinterest, nous encourageant à nous retrousser les manches et à redonner vie à nos espaces. Au retour des vacances, on se sent fiers et accomplis, prêts à montrer à nos collègues des avant/après.

Si les crises et la pandémie de COVID-19 ont poussé de plus en plus de personnes à voyager, elles ont aussi été un moteur pour rester chez soi pendant les vacances. De plus en plus de Français comprennent qu’il n’y a pas besoin de partir à l’autre bout du monde pour se déconnecter. C’est une vraie occasion de vous replonger dans votre environnement, le redécouvrir, et vous rappeler pourquoi vous avez eu le coup de cœur.